« J’ai eu une réunion qui a duré des heures aujourd’hui… J’ai un mal de crâne terrible ! »
« Oui bah moi, je fais un métier pourri et je suis sous-payé alors te plains pas ! »
Tout bon humain qui se respecte a déjà été confronté à ce suffixe pesant qui nous garrotte le souffle en nous assommant de sa langueur mièvre : « oui, bah moi… ».
Cette sournoise réplique est l’incarnation défaitiste de la victimisation à l’extrême. Oui bien sur, d’horribles évènements frappent chaque jour notre écosystème toussotant. Oui bien sur d’atroces infamies pèsent sur la survie difficile de certains. Oui bien sur nous nous devons de remettre nos petites angoisses embourgeoisées dans un contexte brulant d’insécurité et de malheurs incarné par le trait d’esprit franchouillard qui racle les esgourdes des enfants depuis que le monde est monde : « finis ton assiette !! Pense à ces enfants qui meurent de faim !! »
S’il est essentiel de gonfler d’optimisme et de relativité nos quotidiens, il est insupportable de voir nos petits tracas dénigrés par cette vicieuse phrase : « oui, bah moi… ».
La définition d’un souci, d’un problème, d’une corvée, d’un obstacle ou d’une fatalité diverge en fonction du seuil de tolérance de chacun. Cette fameuse goutte d’eau qui fait déborder ce tristement célèbre vase pourra s’incarner en une contrariété toute minime et pourra pourtant submerger quelqu’un d’un tsunami de désespoir.
La hiérarchisation des problèmes est une vile habitude qu’il nous faut combattre.